mardi 28 juillet 2015

La péricope de la femme adultère est-elle authentique?

La péricope de la femme adultère est contenue dans l'Évangile de Jean (8, 1–11). Quoique présente dans toutes les Bibles, son authenticité est plus que contestable; en effet, elle ne se trouve dans aucun des manuscrits antérieurs à 400, elle n'est donc ni dans le Papyrus Bodmer 66 (fin IIe), ni dans le Papyrus Bodmer 75 (début IIIe), ni dans le Sinaiticus ni dans le Vaticanus (IVe siècle), la péricope manque encore dans la totalité des manuscrits antérieurs à 700, bien trop longs à énumérer, excepté le Codex Bezæ
Sa présence dans ce codex ne doit pas étonner, ce manuscrit est surchargé d'interpolations marcionites qui accentuent la rupture entre christianisme et Judaïsme.
L'inauthenticité de cette péricope ne fait aucun doute pour quiconque veut s'y intéresser sérieusement. Mais, la réalité c'est que personne n'ose dire qu'elle est fausse, parce que tout le monde est sous son charme; il suffit de se souvenir que, dans le film La Passion du Christ, Mel Gibson est parvenu à y faire allusion. À notre connaissance, seuls les Témoins de Jéhovah l'ont bannie de leurs Bibles. Comme elle est inauthentique, le mieux est de la barrer dans la sienne:
1. Jésus se rendit à la montagne des oliviers. 2. Mais, dès le matin, il alla de nouveau dans le temple, et tout le peuple vint à lui. S’étant assis, il les enseignait. 3. Alors les scribes et les pharisiens amenèrent une femme surprise en adultère ; 4. et, la plaçant au milieu du peuple, ils dirent à Jésus : « Maître, cette femme a été surprise en flagrant délit d’adultère. 5. Moïse, dans la loi, nous a ordonné de lapider de telles femmes. Toi donc, que dis-tu ? » 6. Ils disaient cela pour l’éprouver, afin de pouvoir l’accuser. Mais Jésus, s’étant baissé, écrivait avec le doigt sur la terre. 7. Comme ils continuaient à l’interroger, il se releva et leur dit : « Que celui de vous qui est sans péché jette le premier la pierre contre elle. » 8. Et s’étant de nouveau baissé, il écrivait sur la terre. 9. Quand ils entendirent cela, accusés par leur conscience, ils se retirèrent un à un, depuis les plus âgés jusqu’aux derniers ; et Jésus resta seul avec la femme qui était là au milieu. 10. Alors s’étant relevé, et ne voyant plus que la femme, Jésus lui dit : « Femme, où sont ceux qui t’accusaient ? Personne ne t’a-t-il condamnée ? » 11. Elle répondit : « Non, Seigneur. » Et Jésus lui dit : « Je ne te condamne pas non plus : va, et ne pèche plus. » (Jean 8, 1–11)
Le marcionisme de la péricope est encore flagrant dans la partie de la phrase qui dit qu'il écrivait avec le doigt sur la terre. Elle signifie simplement que le Dieu Bon de Marcion (Jésus) est occupé d'écrire la Nouvelle Loi qui abolit la Torah. Ce passage correspond à Exode 31, 18:
Dieu donna à Moïse, lorsqu’il eut achevé de s’entretenir avec lui sur le mont Sinaï, les deux tables du Statut, tables de pierre, burinées par le doigt de Dieu.
Rappelons que d'après Marcion, le texte de Matthieu 5, 17–20 aurait été trafiqué par des judaïsants, et que donc Jésus n'aurait pas dit
Ne croyez pas que je sois venu abolir la loi ou les prophètes: je ne suis pas venu abolir mais accomplir.
Mais, toujours d'après Marcion, Jésus aurait en réalité dit:
Ne croyez pas que je sois venu accomplir la loi, je suis venu abolir la Loi.
D'après Boismard, le style s'apparente à celui de Luc, ce qui pour nous signifie bien entendu  Marcion...
Bref, une fausse péricope.


samedi 25 juillet 2015

La conversion au Judaïsme d'Izatès, roi d'Adiabène

Dans un passage émouvant des Antiquités Juives, Flavius Josèphe raconte la conversion au Judaïsme d'Izatès, roi d'Adiabène (Livre XX, Chapitre II, §§ 3–4):
Au temps où Izatès vivait au Camp de Spasinès, un commerçant juif, nommé Ananias, qui avait accès dans le gynécée royal, apprit aux femmes à adorer Dieu selon la coutume nationale des Juifs. Grâce à elles il se fit connaître d'Izatès et le persuada aussi. Lorsque celui-ci fut rappelé par son père en Adiabène, Ananias l'accompagna, obéissant à ses pressantes sollicitations. Or, il était arrivé qu'Hélène, instruite de la même façon par un autre Juif, s'était convertie également à leurs lois. Quand Izatès eut pris la royauté et qu'arrivant en Adiabène il vit ses frères et ses autres parents enchaînés, il fut mécontent de ce qui était arrivé. Regardant comme impie de les tuer ou de les garder enchaînés, mais jugeant dangereux de les laisser libres auprès de lui alors qu'ils se souviendraient des offenses reçues, il envoya les uns comme otages à Rome près de l'empereur Claude avec leurs enfants et il expédia les autres sous un prétexte analogue chez Atabane le Parthe.
Ayant appris que sa mère était fort satisfaite des coutumes juives, il s'empressa de s'y rallier également, et croyant qu'il ne serait définitivement juif qu'une fois circoncis, il était prêt à se faire circoncire. Mais sa mère, l'apprenant, tenta de l'empêcher en lui disant que cela le mettrait en danger: en effet, il était roi et il s'aliénerait beaucoup ses sujets s'ils apprenaient qu'il désirait adopter des mœurs étrangères et opposées aux leurs, car ils ne supporteraient pas d'avoir un roi juif. Voilà ce qu'elle disait, s'opposant de toutes ses forces à son dessein, et Izatès rapporta ses paroles à Ananias. Mais ce dernier approuva la mère du roi; il le menaça de le quitter s'il ne lui obéissait pas et de l'abandonner. En effet, il craignait, disait-il, si l'affaire était connue de tous, de risquer de se voir châtié comme responsable de tout cela et comme ayant incité le roi à des actes indignes de lui; d'ailleurs, le roi pouvait adorer Dieu, même sans être circoncis, s'il avait décidé d'observer complètement les lois ancestrales des Juifs, ce qui importait plus que la circoncision. Il lui dit aussi que Dieu lui-même lui pardonnerait d'avoir renoncé à ce vite, contraint à cela par la nécessité et la crainte qu'il avait de ses sujets. Le roi se laissa alors persuader par ses paroles. Mais ensuite, comme il n'avait pas renoncé absolument à son dessein, un second Juif venu de Galilée et nommé Eléazar, qui passait pour très versé dans la loi de ses pères, l'exhorta à accomplir cet acte. En effet, étant entré chez lui pour le saluer et l'avant surpris en train de lire la loi de Moïse: «Tu ignores, dit-il, que tu fais la plus grande offense aux lois et par suite à Dieu: il ne suffit pas de les lire, il faut avant tant faire ce qu'elles ordonnent. Jusques à quand resteras-tu incirconcis ? Si tu n'as pas encore lu la loi sur la circoncision, lis la sur le champ pour savoir quelle est ton impiété.»
Après avoir entendu ces paroles, le roi ne différa plus l'opération: se retirant dans une autre chambre et ayant mandé un médecin, il exécuta ce qu'on lui avait prescrit; puis il envoya chercher sa mère et son maître Ananias et leur indiqua qu'il avait accompli ce rite. Ils furent aussitôt saisis de stupeur et d'une grande crainte, se disant que, si la chose était connue, le roi risquerait de se voir chasser du pouvoir, parce que ses sujets ne supporteraient pas d'être gouvernés par un zélateur des coutumes étrangères, et qu'eux-mêmes seraient en danger, parce que la responsabilité en serait rejetée sur eux. Mais Dieu empêcha leurs craintes de se réaliser. Car, bien qu'Izatès tombât dans mille dangers, il le sauva ainsi que ses fils, en le faisant passer d'une situation désespérée à la sécurité, montrant ainsi que ceux qui lèvent les yeux vers lui et se fient à lui seul ne sont pas frustrés du fruit de leur piété. Mais nous raconterons cela plus loin.
Flavius Josèphe ne donne pas le nom du père d'Éléazar, ce qui est bien dommage. Il n'existe que deux possibilités, soit il ne le connaît pas, soit il le connaît mais ne peut ou ne veut le dire. La première solution étant peu vraisemblable, on est forcé de supposer qu'il ne peut ou ne veut le dire; il convient donc de chercher dans ses œuvres un Éléazar qui pourrait correspondre à cette définition. Or, il y a bien un Éléazar qui correspond à cela, il s'agit d'Éléazar ben Yaïr, qui fut le petit-fils de Judas le Galiléen et le chef sicaire qui commanda la forteresse de Massada qui résista aux légions romaines jusqu'en 74. Les sicaires qui l'accompagnaient, comme lui-même, préférèrent le suicide à la reddition. 
Nous pensons que l'Éléazar qui convainquit Izatès roi d'Adiabène de se faire circoncire, est bien Éléazar ben Yaïr, ce qu'il ne pouvait pas mentionner pour son lectorat romain.

Buste de Flavius Josèphe

Le royaume d'Adiabène


Le chameau par le chas d'une aiguille: un hapax hébreu

Dans les évangiles, on lit l'épisode suivant:
Εὐκοπώτερόν ἐστιν κάμηλον διὰ τῆς τρυμαλιᾶς τῆς ῥαφίδος εἰσελθεῖν, ἢ πλούσιον εἰς τὴν βασιλείαν τοῦ θεοῦ εἰσελθεῖν. 
Il est plus facile à un chameau de passer par le trou d'une aiguille qu'à un riche d'entrer dans le royaume de Dieu. 
L'apophtegme ne voulant pas dire grand chose, on sait par avance qu'un chameau ne passera pas à travers le chas d'une aiguille, les exégètes ont supposé que la version originale avait κάμιλος (kamilos), «la corde», au lieu de κάμηλος (kamelos), «le chameau». On a donc supposé que l'un des premier copiste avait écrit un hèta au lieu d'un iota. C'est intéressant, mais cela ne résout rien, si la corde est plus grosse que le chat de l'aiguille, on sait à nouveau par avance qu'elle ne passera pas à travers le chas de l'aiguille; on revient donc à la case départ.
Je vais partir du principe que Jésus parlait hébreu, il a donc dit:
Il est plus facile à un g-m-l de passer par le chas d'une aiguille qu'à un riche d'entrer dans le royaume de Dieu.
Le traducteur aura supposé que la trilitère g-m-l (גמל) signifiait forcément «chameau». La trilitère g-m-l signifie aussi «faire du bien ou du mal», mais aussi «sevrer». Mais il s'agit de verbes dans les deux cas, et cela n'aide pas à la compréhension du sens.
Il doit donc exister une autre possibilité, c'est que la trilitère g-m-l est un hapax, dont le sens s'est perdu avec les siècles. Cette trilitère g-m-l est aussi le nom de la troisième lettre de l'alphabet hébreu gîmèl: ג.
Il existe plusieurs représentations du gimèl, dans le dessin suivant, nous allons montrer quelques représentations de cette lettre, des formes les plus anciennes à sa forme définitive encore en usage maintenant.


La première est en araméen impérial; la seconde est une forme intermédiaire entre l'araméen impérial et l'hébreu; la troisième et dernière est le gimèl dans sa forme hébraïque telle qu'elle sera en usage depuis –400 jusqu'à maintenant. 
Gimèl signifie «chameau» et le nom de cette lettre lui fut donnée sur base de sa forme; en effet la forme évoque la tête, le long cou et les pattes avant de l'animal... Ce qui l'on peut comprendre en observant le gimel toujours en usage (la troisième lettre dans le tableau), mais c'est beaucoup moins clair avec les formes plus anciennes de cette lettre. La forme la plus ancienne qui ressemble à un «v» à l'envers ou à un lambda grec majuscule (Λ), notons d'ailleurs la similarité de la seconde lettre avec le lambda minuscule (λ), mais ce n'est pas le propos ici. 
Nous avons dit que l'un des sens de la trilitère g-m-l était «faire le bien ou le mal»; or en regardant la première forme, on y voit bien la dualité, les deux pieds de la lettres allant chacun dans une direction opposée. Notons que nous avons une similitude avec les deux barres du «Y» pythagoricien qui exprime la nécessité de faire un choix entre la voie de gauche et la voie de droite, mais même s'il y a deux chemins il n'y a en qu'un qui fera de l'homme un homme divin, s'il consent à suivre les commandements de Pythagore. (Voir ci-dessous une gravure provenant du Champ Fleury de Geoffroy Tory (1529) qui est une représentation «moralisée» de la «lettre pythagorique».)




Venons-en à la résolution de l'énigme. La forme du gimel en araméen impérial (Λ) ressemble à un fil qui s'effiloche en une multitude de fils plus petits. Cette division d'un fil en une multitude de petits fils permet de comprendre le sens de la trilitère g-m-l qui signifie «faire le bien ou le mal», en plus un fil effiloché est difficile à faire rentrer par le chas d'une aiguille.
Le sens le plus probable de la phrase est alors: 
Il est plus facile de faire passer un fil effiloché par le chas d'une aiguille qu'à un riche d'entrer dans le royaume de Dieu. 
Ce sens permet seul d'expliquer la phrase. Un fil effiloché peut, à force d'efforts, passer par le chas d'une aiguille, mais cela reste difficile, de même qu'on ne peut exclure qu'un riche puisse entrer dans le royaume de Dieu, même si c'est difficile. Alors qu'on sait parfaitement à la base que ni un chameau ni un câble ne passeront par le trou de l'aiguille. 

— Stephan Hoebeeck

vendredi 24 juillet 2015

Sur la manière exacte de traduire le premier verset de l'Évangile de Jean


Le premier verset de l'Évangile de Jean est un des plus important du Nouveau Testament. Il ne présente pas de grandes complexités dans sa traduction, cela ne l'empêche pas d'être systématiquement mal traduit dans les traductions, excepté la Vulgate latine.

Texte
Ἐν ἀρχῇ ἦν ὁ λόγος, καὶ ὁ λόγος ἦν πρὸς τὸν θεόν, καὶ θεὸς ἦν ὁ λόγος.
En translittération (e = η)
Èn arkei en o logos, kai o logos en pros ton thèon, kai thèos en o logos.
Le texte est composé de trois segments de phrases
  • Le premier, Èn arkei en o logos, ne pose pas de problèmes particuliers et signifie Au commencement était le Logos. Notons juste que Èn arkei sont aussi les deux premiers mots de la Genèse dans la traduction des Septante. 
  • Le second, kai o logos en pros ton thèon, ne pose pas non plus de problèmes et signifie et le Logos était auprès de Dieu
  • Le troisième et dernier passage est problématique non pas au niveau du grec mais au niveau des traductions. Ainsi, le passage kai thèos en o logos est systématiquement mal rendu, les traducteurs, profitant de ce que le sujet et l'attribut du sujet avec être sont tous deux aux nominatifs, s'obstinent à faire de thèos l'attribut du sujet et de o logos le sujet; or en grec il n'y a aucun doute à avoir le sujet c'est le premier mot, donc thèos et l'attribut du sujet, c'est o logos. Les traductions habituelles de cette ultime partie du verset ont donc et le Logos ou la parole était Dieu ou un dieu, alors que la seule traduction possible, c'est et Dieu était le Logos
La traduction complète du verset est donc:
Au commencement était le Logos, et le Logos était auprès de Dieu, et Dieu était le Logos.
On peut assez légitimement se demander, les raisons qui poussent à mal traduire.
En premier, la phrase paraît incohérente, comment le Logos fait-il pour être auprès de Dieu et en même temps Dieu serait le Logos?
Notre première idée fut de rejeter la partie finale comme étant une interpolation, c'est d'ailleurs l'avis de l'abbé Boismard que j'avais suivi. Mais aujourd'hui, je reviens quelque peu sur cette évaluation. 
Mais alors comment la comprendre?
Je pense en premier que ceux qui traduisent Et le Logos était Dieu, éludent les influences philoniennes sur cette phrase, auxquelles ils sont bien obligés de consentir quant on lit la phrase ainsi et Dieu était le Logos.
Philon d'Alexandrie fut un philosophe juif de la première moitié du premier siècle. Confronté aux attaques philosophiques contre le judaïsme, il affronta les philosophes païens sur leur propre terrain, celui de la question du Logos. Les stoïciens, comme je l'ai dit ailleurs prétextaient des anthropomorphisme de la Bible pour nier la révélation biblique. En effet, Dieu dans la philosophie stoïcienne est un dieu qui ne fait rien, ce qui agit ce sont les logoï qui correspondent aux dieux du paganisme et qui agissent à sa place. Philon a donc défendu l'idée que l'activité de Dieu dans la Bible, autant que les déplacements de Dieu... ne sont pas faits par Dieu lui-même, mais par le Logos de Dieu. Le Logos correspondant alors à l'activité divine, Philon usera de multiples qualificatifs pour en parler, il dira que le Logos est le Fils de Dieu, il dira que le Logos est le deutéro Dieu ou Deuxième Dieu, il en parlera aussi comme étant un archange, en réalité l'unique archange. Mais en réalité, chez Philon, le Logos est l'activité de Dieu.
Revenons au verset 1, 1 de l'Évangile de Jean, l'auteur a subi manifestement l'influence de Philon d'Alexandrie. Les traductions de Logos par parole ou dire que la parole était Dieu, sont de simples édulcorations pour éviter de répondre à une question simple: les rédacteurs du Nouveau Testament étaient-ils de pauvres juifs illettrés ou des juifs hellénisés, et surtout quand ont-ils vécu?
S'il est exact que dans la traduction grecque des Septante, l'hébreu davar, «parole» est traduit par logos, cela ne signifie pas que dans l'Évangile de Jean, et particulièrement dans le verset 1, on puisse pour autant le traduire par «parole». Cette habitude de traduire Logos par parole vise simplement à éluder les sources philosophiques judéo-hellénistiques de cet évangile.
Un ami nous a rappelé que Saint Jérôme traduit, et Deus erat verbum, que l'on peut difficilement traduire autrement que par Et Dieu était le Verbe.

mardi 21 juillet 2015

Le Baptême de Jean d'après les évangiles et d'après Flavius Josèphe


En Luc 3, 1, nous lisons:
Et il alla dans tout le pays des environs de Jourdain, prêchant le baptême de repentance, pour la rémission des péchés.
En Marc 1, 4, nous lisons:
Jean parut, baptisant dans le désert, et prêchant le baptême de repentance, pour la rémission des péchés.
Matthieu est un peu plus en nuance, en effet nous lisons en 3, 11:
Moi, je vous baptise d’eau, pour vous amener à la repentance; mais celui qui vient après moi est plus puissant que moi, et je ne suis pas digne de porter ses souliers. Lui, il vous baptisera du Saint-Esprit et de feu.
Jean ne dit rien à ce propos.
Maintenant voyons ce que dit Flavius Josèphe dans ses Antiquités Juives (Livre XVIII, Chapitre V, §2):
Or, il y avait des Juifs pour penser que, si l'armée d'Hérode avait péri [l'armée d'Hérode Antipas fut écrasée par les armées d'Aretas IV de Petra, roi de Nabatée], c'était par la volonté divine et en juste vengeance de Jean surnommé Baptiste. En effet, Hérode l'avait fait tuer, quoique ce fût un homme de bien et qu'il excitât les Juifs à pratiquer la vertu, à être justes les uns envers les autres et pieux envers Dieu pour recevoir le baptême ; car c'est à cette condition que Dieu considérerait le baptême comme agréable, s'il servait non pour se faire pardonner certaines fautes, mais pour purifier le corps, après qu'on eût préalablement purifié l'âme par la justice. Des gens s'étaient rassemblés autour de lui, car ils étaient très exaltés en l'entendant parler. Hérode craignait qu'une telle faculté de persuader ne suscitât une révolte, la foule semblant prête à suivre en tout les conseils de cet homme. Il aima donc mieux s'emparer de lui avant que quelque trouble se fût produit à son sujet, que d'avoir à se repentir plus tard, si un mouvement avait lieu, de s'être exposé à des périls. À cause de ces soupçons d'Hérode, Jean fut envoyé à Machaero [en Pérée, du côté jordanien de la Mer Morte, probablement pour faire face à Aretas IV], la forteresse dont nous avons parlé plus haut, et y fut tué. Les Juifs crurent que c'était pour le venger qu'une catastrophe s'était abattue sur l'armée, Dieu voulant ainsi punir Hérode.
Je donnerai plutôt raison à Flavius Josèphe qu'aux évangiles. En effet, le baptême de purification des péchés est une particularité pharisienne demandée aux non-juifs (aux femmes et aux hommes, mais pour les hommes après leur circoncision) au moment de leur conversion.
Flavius Josèphe dit aussi dans son Autobiographie:
Jugeant même insuffisante l’expérience que j’en avais tirée, quand j’entendis parler d’un certain Bannous qui vivait au désert, se contentait pour vêtement de ce que lui fournissait les arbres, et pour nourriture, de ce que la terre produit spontanément, et usait de fréquentes ablutions d’eau froide de jour et de nuit, par souci de pureté, je me fis son disciple. Après trois années passées près de lui, ayant accompli ce que je désirais, je revins dans ma cité.
Il est donc vraisemblable que les évangéliste ont réécrit ce passage vers 120–140, pour le mettre en conformité à la tradition pharisienne.

samedi 18 juillet 2015

Langues de feu

Les langues de feu sont mentionnées dans un passage des Actes des Apôtres (2, 1–4), examinons le passage:
1. Le jour de la Pentecôte, ils étaient tous ensemble dans le même lieu. 2. Tout à coup il vint du ciel un bruit comme celui d’un vent impétueux, et il remplit toute la maison où ils étaient assis. 3. Des langues, semblables à des langues de feu, leur apparurent, séparées les unes des autres, et se posèrent sur chacun d’eux. 4. Et ils furent tous remplis du Saint-Esprit, et se mirent à parler en d’autres langues, selon que l’Esprit leur donnait de s’exprimer.
Cette expression «langues de feu» se trouve en Isaïe (5, 24), mais avec une toute autre signification:
Aussi, de même qu'une langue de feu dévore le chaume, de même que l'herbe sèche disparaît dans la flamme, ainsi leur racine sera réduite en pourriture, et leur fleur sera emportée comme la poussière car ils ont repoussé la loi de l'Eternel-Cebaot et méprisé la parole du Saint d'Israël.
Comme on le constate, langue de feu à la sens de flammèche.
«Langue de feu» n'étant pas une expression talmudique, son origine est restée énigmatique pendant des siècles.
Au XIXe siècle, on en découvrit une première occurence dans le Livre d'Hénoch (71, 3–7):
3. L’ange Michaêl, un des chefs des anges, me prit la main droite, et il me releva et me conduisit là où sont tous les secrets, et il me montra tous les secrets de miséricorde, et il me montra tous les secrets de justice, 4. et il me montra tous les secrets des extrémités du ciel, et tous les réservoirs des étoiles et de toutes les lumières, d’où elles se lèvent en présence des saints. 5. Et il cacha mon esprit, et moi, Hénoch, (je fus) dans le ciel des cieux, et je vis là au milieu de cette lumière, comme une maison qui était bâtie en blocs de glace, et parmi ces blocs (il y avait) des langues de feu vivant. 6. Et mon esprit vit un cercle qui entourait de feu cette maison, depuis ses quatre coins jusqu’à ces fleuves pleins de feu vivant qui entouraient cette maison. 7. Et (il y avait) autour d’elle les Séraphins et les Chérubins et les Ophanim : ce sont ceux qui ne dorment pas et qui gardent le trône de sa gloire (du Seigneur).
L'expression a des similitudes avec les Actes, mais la découverte des manuscrits de Qumran va amplifier le débat. En effet, deux minuscules fragments d'un même texte inconnu utilisent cette expression, il s'agit de 4Q29 et de 4Q376: 
... et vos ourim. Et elle [probablement la nuée, voir plus bas] s'avancera avec lui, avec des langues de feu. La pierre de gauche qui se trouve sur son côté gauche sera découverte devant toute la congrégation jusqu'à ce que le prêtre ait fini de parler. Et quand la nuée aura disparu... Et vous observerez [...] et [le prophète] vous a parlé...
Les autres fragments de ce manuscrits montrent qu'il s'agit d'interrogations qu'un prêtre fait avec les ourim pour connaître l'issue d'une bataille.
Certes, ce n'est pas grand chose, mais les deux seules occurences de cette expression en-dehors du Nouveau Testament sont dans deux textes esséniens. 
Notons particulièrement le triple rapport entre le fragment de qumran et les Actes:
nuées/vents impétueux, 
langues de feu/langues de feu
prophétiser avec les ourim/parler en langues

Notons encore que la Pentecôte est à l'origine une fête juive appelée Shavû°ôth ou Fête des Semaines. Cette fête est très importante dans le Judaïsme (l'une des trois grandes avec Pâque et Tentes), on commémore le don de la Torah que reçut Moïse sur le mont Sinaï. Cette fête était la principale des trois pour les esséniens, on y refaisait les Serments solennels envers Dieu et surtout, cette fête était le moment de l'année pendant laquelle les esséniens progressaient en grade (les esséniens avaient quatre grades).

PS. Les passages entre Isaïe et Actes ou fragments qumraniens ne sont pas aussi différents qu'on pourrait le penser: l'impie qui reçoit l'Esprit Saint est consumé, l'homme pieux qui reçoit l'Esprit Saint est transformé. C'est le même feu, mais ce qu'il donnera à l'homme dépend des qualités propres à chacun.





vendredi 17 juillet 2015

Réflexions sur Jean 1, 51b

Dans l'Évangile de Jean, au verset 51 du chapitre I, nous lisons:

[Et il lui dit:]
En vérité, en vérité, vous verrez désormais le ciel ouvert et les anges de Dieu monter et descendre sur le Fils de l’homme. 
Ce verset est à rapprocher de Daniel 7, 13, mais il n’en permet pas une explication complète. 

L'allusion aux anges qui montent et descendent rapprochent ce verset  avec Genèse 28, 12–19, dont voici quelques extraits significatifs:
Une échelle était dressée sur la terre, son sommet atteignait le ciel et des messagers divins montaient et descendaient le long de cette échelle... Jacob, s’étant réveillé, s’écria : « Assurément, l’Éternel est présent en ce lieu et moi je l’ignorais. » Et, saisi de crainte, il ajouta : « Que ce lieu est redoutable ! ceci n’est autre que la maison du Seigneur et c’est ici la porte du ciel. » ... Il appela cet endroit Béthel ; mais Luz était d’abord le nom de la ville.
Le Fils de l’homme est donc comparable à Bethel et à Lûz, or Bethel signifie «Maison-Dieu» et Lûz n'est pas qu'un nom de lieu mais désigne l’«os de la résurrection» dans la Kabbale.
Le Midrash Rabba 28, 3 dit: 
Rabbi Yéhochoua ben Hanania montra à l’empereur Adrien que le Luz était extrêmement résistant. Il tenta de le broyer sous une meule, sans succès. Il tenta de le brûler, sans y parvenir. Il tenta de le faire s’effriter dans l’eau, sans résultat. Il le mit sur une enclume pour le frapper, c’est l’enclume qui se fendit, le marteau se cassa mais l’os resta entier. 
C’est l’os qui se trouve à la base de la colonne vertébrale et que Dieu utilisera pour reconstituer les corps humains lors de la résurrection. Cet os est évidemment l’énergie divine qui repose à la base de chaque être. C’est pour cela que les méchants ne ressusciterons pas, parce que leur méchanceté a éteint la partie divine en l’homme et que les bons ressusciterons parce que leurs pratiques spirituelles ont conservé son indestructibilité. Le Fils de l’homme désigne bien, dans cette partie du Nouveau Testament, non Jésus, mais la part de Dieu en chaque homme, autrement dit le Luz.
Quant aux anges qui montent et descendent, peut-être cela fait-il allusion à la rosée, matière vivificatrice par excellente, dont Dieu versera quelques gouttes sur la tombe, et le défunt se lèvera vivant; elle jouera un rôle déterminant dans la restauration des corps. 
Mais plus probablement, ces anges qui montent et descendent, ceux qui montent sont peut-être les prières des hommes qui montent à Dieu et ceux qui descendent sont ses bénédictions qui s'épanchent sur les mondes.

dimanche 12 juillet 2015

Calligraphie gothique

Bonjour à toutes et à tous
Vous ne le savez pas mais j'adore le gothique et je suis en extase devant la calligraphie suivante: (Alle Weissheit ist bey Gott dem Herrn…  Siracide, premier chapitre, traduction allemande, artiste anonyme, 1654)

Qui fut le Simon qui fit une prophétie au sujet de Jésus enfant?

Rappelons le passage d'abord qui ne se trouve qu'en Luc 2, 25–35:
Et voici, il y avait à Jérusalem un homme appelé Siméon. Cet homme était juste et pieux, il attendait la consolation d’Israël, etl’Esprit Saint était sur lui. Il avait été divinement averti par le Saint-Esprit qu’il ne mourrait point avant d’avoir vu l’envoyé du Seigneur. Il vint au temple, poussé par l’Esprit. Et, comme les parents apportaient le petit enfant pour accomplir à son égard ce qu’ordonnait la loi, il le reçut dans ses bras, bénit Dieu, et dit [Nunc Dimitis]: «Maintenant, Seigneur, tu laisses ton serviteur S’en aller en paix, selon ta parole. Car mes yeux ont vu ton salut, salut que tu aies préparé devant tous les peuples, lumière pour éclairer les nations et gloire d’Israël, ton peuple.» Son père [Dieu ou Joseph?] et sa mère étaient dans l’admiration des choses qu’on disait de lui. Siméon les bénit, et dit à sa mère: «Voici, cet enfant est destiné à amener la chute et le relèvement de plusieurs en Israël, et à devenir un signe qui provoquera la contradiction, et à toi-même une épée te transpercera l’âme, afin que les pensées de beaucoup de cœurs soient dévoilées.»
On a proposé de voir dans ce Simon qui annonce Jésus, Simon ben Hillel, le fils du chef (nassi) du Sanhédrin. La solution est tentante mais fut rejetée parce que sa présence au Temple en ferait vraisemblablement un qohen ou un prêtre descendant d'Aaron (tous les prêtres ou qohanîm sont des descendants d'Aaron).
Il existait bien un Simon actif à l'époque des événements. Simon l'Essénien qui est mentionné par Flavius Josèphe dans ses Antiquités comme dans La Guerre des Juifs contre Rome. Voyons ce qu'il en dit.
Guerre des Juives contre Rome, Livre II, 7–3:
Quand Archélaüs eut pris possession de l'ethnarchie, il n'oublia pas ses anciennes rancunes, mais traita avec férocité les Juifs et même les Samaritains. Les uns et les autres ayant envoyé des députés à César, la neuvième année de son règne. Archélaüs fut exilé dans la ville de Vienne en Gaule: sa fortune fut attribuée au fisc de l'empereur. On dit qu'avant d'être mandé par César, il eut un songe: il lui sembla voir neuf épis pleins et grands que broutaient des bœufs. Il fit venir les devins et quelques Chaldéens et leur demanda d'interpréter ce présage. Chacun l'expliqua à sa façon, mais un certain Simon, de la secte Essénienne, dit que les épis signifiaient des années et les bœufs une révolution, parce que les bœufs, en traçant le sillon, bouleversent la terre: il règnerait donc autant d'années qu'il y avait d'épis, et mourrait après une existence très mouvementée. Cinq jours après, Archélaüs était cité au tribunal de César.
Antiquités Juives, Livre XVIII, 13–3: 
Avant qu’Archélaüs eût été invité à se rendre à Rome, il eut le songe suivant, qu’il raconta à ses amis. Il avait vu dix épis de blé pleins de froment ; déjà arrivés chacun à pleine maturité, et il lui avait semblé que des bœufs les dévoraient. Une fois éveillé, pensant que sa vision lui présageait des choses graves, il fit venir les devins qui s’occupaient d’interpréter les songes. Comme ils différaient d’avis les uns des autres — car tous étaient loin de s’accorder — Simon, Essénien de race, après avoir demandé qu’on lui garantit sa sûreté, dit que cette vision présageait à Archélaüs un changement peu favorable dans ses affaires ; en effet, les bœufs étaient signe de souffrance, puisque c’étaient des animaux assujettis à un labeur pénible ; quant au changement de situation, il s’annonçait par le fait que la terre labourée par leur travail ne pouvait rester dans le même état ; les dix épis signifiaient un nombre égal d’années puisqu’il y a une moisson par année : c’était le terme fixé pour la puissance d’Archélaüs. Telle fut son interprétation de ce songe. Cinq jours après avoir vu cette vision, Archélaüs vit arriver l’autre Archélaüs envoyé en Judée par l’empereur pour le citer en justice.
Nous pensons que le Simon qui fait la prophétie sur Jésus est bien Simon l'Essénien. Les qohanîm esséniens continuaient à officier au Temple quand la halakha pharisienne n'était pas appliquée. Sa présence peut donc être logique. 
Une partie de la prophétie sur Jésus est quasi citation d'un texte essénien: Hymnes B des Hôdayôth retrouvés à Qumran et attribués au Maître de Justice, voyons les similitudes.
Simon dit au sujet de Jésus, d'après Luc:
Voici, cet enfant est destiné à amener la chute et le relèvement de plusieurs en Israël, et à devenir un signe qui provoquera la contradiction, et à toi-même une épée te transpercera l’âme, afin que les pensées de beaucoup de cœurs soient dévoilées.
Le Maître de Justice dit de lui-même:
Et je fus un piège pour les pécheurs mais la guérison pour tous ceux qui se convertissent du péché (II, 8–9 partiels)
Et contre moi l'assemblée des impies faisait rage, et ils grondaient comme les tempêtes sur les mers, quand leurs flots font rage, projetant vase et limon. Mais tu as fais de moi une bannière pour les élus de justice et un interprète plein de connaissance concernant les mystères merveilleux, pour éprouver les hommes de vérité et pour mettre à l'épreuve ceux qui aiment l'instruction. (II, 12 à 14 début)
Et je fus un homme de querelle pour les interprètes d'égarement, mais un homme de paix pour tous ceux qui voient les choses vraies (II, 14 fin–15 début)
Et tous les hommes de tromperies grondaient contre moi... et ils ont renversé vers la fosse la vie de l'homme par la bouche duquel tu as placé l'intelligence pour qu'il ouvrit la source de la connaissance pour tous les intelligents, mais il ont troqué cela pour l'incirconcision des lèvres et la langue étrangère d'un peuple sans intelligence afin qu'ils se perdissent en leurs égarements. (II 16 à 19, partiel)
Et eux, c'est de ta part qu'is ont attenté à ma vie, afin que Tu fusses glorifié par le jugement des impies et que tu manifestasses ta puissance en moi en face des fils d'hommes car c'est par ta grâce que je me tiens debout. (II 23 fin à 25 début).
Et ils ont décoché des flèches (II, 34)
Les chrétiens durent avoir des fragments d'un biographie du Maître de Justice dont ils se servirent pour composer leur Vie de Jésus... 







samedi 11 juillet 2015

La condamnation de la pédophilie dans l'Ancien Testament ou Tanakh

Certaines personnes croient, à partir d'une lecture superficielle, que la pédophilie n'est pas condamnée dans le Tanakh ou Ancien Testament. Qui pourrait croire pourtant que Dieu ne condamnerait pas cette monstruosité.
Cet acte immonde est évidemment condamné dans la Torah, mais le terme utilisé est particulier et difficile à comprendre; ainsi, nous estimons que c'est bien la pédophilie qui est désignée en Lévitique 18, 21:
וּמִזַּרְעֲךָ לֹא-תִתֵּן, לְהַעֲבִיר לַמֹּלֶךְ; וְלֹא תְחַלֵּל אֶת-שֵׁם אֱלֹהֶיךָ אֲנִי יְהוָה
Et voici ce passage en français
Ne livre pas n'importe qui de ta progéniture en offrande à Molokh, pour ne pas profaner le nom de ton Dieu: je suis l'Éternel.
Personne ne semble surpris qu'on trouve l'expression «offrir sa progéniture à Molokh», au sein des interdits sexuels: en Lévitique 18, 6 à 17, nous lisons la condamnation des mariages consanguins; en Lévitique 18, 18, nous lisons une limitation de la polygamie, voire sa quasi interdiction (rappelons que la polygamie fut interdite dans le Judaïsme au VIIIe siècle, du moins en monde ashkénaze, plus tardivement en monde sefarade, mais qu'elle fut très peu pratiquée); en Lévitique 18, 19, l'interdiction d'approcher les femmes au moment de leurs menstruations; en Lévitique 18, 20, l'interdiction de convoiter la femme mariée; en Lévitique 18, 22, l'interdiction de l'homosexualité masculine; en Lévitique 18, 23, l'interdiction de la bestialité qui condamne explicitement tant l'union d'un homme avec un animal que l'union d'une femme avec un animal. Il nous semble donc que l'expression «livrer sa progéniture en offrande à Molokh» a bien des aspects sexuels qui nous paraissent correspondre à ce que l'on appelle aujourd'hui la pédophilie, puisque cet interdit, à cet endroit précis de Lévitique, est précédé et suivi d'interdits sexuels.
Le nom maudit de Molokh se retrouve encore en quelques endroits de la Bible; comme un peu plus loin, en Lévitique 20, 2–5, néanmoins nous citerons aussi les versets 6 à 8 qui ne sont pas sans rapports avec les précédents:
2 Quant aux enfants d'Israël, tu leur diras: «Quiconque, parmi les Israélites ou les étrangers séjournant en Israël, livrerait quelqu'un de sa postérité à Molokh, doit être mis à mort: le peuple du pays le tuera à coups de pierres. 3 Moi-même je dirigerai mon regard sur cet homme, et je le retrancherai du milieu de son peuple, parce qu'il a donné de sa postérité à Molokh, souillant ainsi mon sanctuaire et avilissant mon nom sacré. 4 Et si le peuple du pays ose fermer les yeux sur la conduite de cet homme, qui aurait donné de sa postérité à Molokh, et qu'on ne le fasse point mourir, 5 ce sera moi alors qui appliquerai mon regard sur cet homme et sur ses complices, et je retrancherai avec lui, du milieu de leur peuple, tous ceux qui, entraînés par lui, se seraient abandonnés au culte de Molokh. 6 Pour la personne qui aurait recours aux évocations, aux sortilèges, et s'abandonnerait à ces pratiques, je dirigerai mon regard sur cette personne, et je la supprimerai du milieu de son peuple. 7 Sanctifiez vous et soyez saints, car je suis l'Éternel votre Dieu. 8 Observez mes lois et les exécutez: je suis l'Éternel qui vous sanctifie.»
Dans ces versets, nous découvrons que «livrer sa postérité à Molokh» a encore d'autres connotations, savoir que cela souille le sanctuaire, que cela avilit le nom sacré et que c'est mis en rapport avec la pratique des sortilèges.
Notons l'opposition entre celui qui se sanctifie et qui est saint, et qui observe les lois et les applique face à celui qui souille le sanctuaire et avilit le Nom sacré, qui invoque les démons et observe les pratiques magiques.

Molokh apparaît encore en I Rois 11, 7, et nous apprenons alors que Salomon avait fait bâtir un Temple à Molokh, et que c'était l'idole des Ammonites; ce nom apparaît encore en deux endroits:
Il déclara impur le Tofèth qui se trouve dans la vallée de Ben-Hinnom, afin que personne n'y fit plus passer son fils ni sa fille par le feu, en l'honneur de Molokh. (II Rois 23, 10)
Et
Ils ont édifié les hauts-lieux de Baal, ceux de la vallée de Hinnom, ils ont fait passer [par le feu] leurs fils et leurs filles en l'honneur de Molokh, acte abominable que je ne leur ai point prescrit et que ma pensée n'a jamais conçu, et ainsi Juda a été entraîné au mal. (Jérémie 32, 35)
On pense aujourd'hui que Moloch pourrait être la translittération d'un mot sémitique ancien signifiant «sacrifice», plutôt que le nom d'une divinité; ce qui, dans le cas des deux derniers passages, colle assez bien:
...afin que personne n'y fit plus passer son fils ni sa fille par le feu du sacrifice.
Et
..., ils ont laissé leurs fils et leurs filles «être sacrifiés», acte abominable...
Mais par dessus tout, ce qui prouve que ce passage est bien une condamnation de la pédophilie, c'est tout simplement, que des textes babyloniens et d'autres de ces régions ont montré que les enfants consacrés aux dieux étaient violés par les prêtres de ces religions abominables... Quand leurs temples disparurent, leurs pratiques pédophiliques furent oubliées, et le verset devint incompréhensible; mais il est certain qu'il y a 3000 ans, aucun Juif ne pouvait se méprendre sur le caractère pédophilique de la consécration à dieux.

Venons-en aux conclusions.
Nous constatons que l'Ancien Testament condamne la pédophilie et assimile le pédophile à quelqu'un qui s'auto-consacre aux démons; les différents passages nous montrent aussi les dégâts considérables qu'elle produit sur la psychologie de l'enfant, puisque l'acte lui-même équivaut à le livrer aux démons. Il est vraisemblable aussi que les connotations goétiques ('ovoth, «faire venir un démon ou obtenir un esprit familier» et yid°onîm, «faire des malefices») n'étaient pas absentes de la pédophilie ancienne. Notons encore que les différents interdits sexuels dans les autres passages (Lévitique 18, 6–20 et 22–23) ne sont pas mis en rapport avec la sorcellerie, seulement la pédophilie, ce qui en fait un crime réellement à part. Il est possible aussi que les sorcelleries dont il est question soient à comparer avec le mystérieux péché contre l'esprit dont il est si obscurément parlé dans le Nouveau Testament (voir: http://essenochristianisme.blogspot.be/2015/06/le-peche-contre-lesprit.html), c'est-à-dire des gens qui sont en échec spirituel et qui espèrent se sauver en pactisant avec quelque démon. 
Quant au remède, il est très simple, l'application de la peine de mort pour de tels crimes, du moins, dès qu'elle sera restaurée. 

— Stephan HOEBEECK

samedi 4 juillet 2015

Jésus fut-il exécuté dans l'après-midi du 14 Nissan ou dans l'après-midi du 15 Nissan

Rappel

  1. Le judaïsme utilise un calendrier mensuel basé sur la lune: les mois sont lunaires, c’est-à-dire que le mois commence lors de la conjonction du soleil et de la lune (nouvelle lune et se termine la nouvelle Lune suivante) suivant l’endroit, la qualité de l’observation, il peut y avoir des divergences quant au commencement du mois.
  2. Le judaïsme estime qu’un jour commence au coucher du soleil et se termine au coucher du soleil suivant. Autrement dit si le soleil se couche à 19h00 un jour quelconque, à 18h59, on est mardi, et à 19h00 on est mercredi. 
  3. La fête de Pâque est complexe parce que plusieurs fêtes se superposent
La fête de Pâque se déroule toujours au mois de Nissan, la fixation du mois de Nissan fut l’objet de polémiques entre pharisiens et sadducéens.
Pour faire simple:
  • si les mois sont lunaires, les années juives sont solaires (chez les musulmans les années sont conçues comme un cycle de douze lunaisons), ce qui veut dire que tous les 3 ans (dans le judaïsme), il est nécessaire d’intercaler un mois supplémentaire.
  • la Pâque se fête à le pleine lune de Nissan qui doit être la première pleine lune après l’équinoxe de printemps (dans la réalité, tous les dix ans, cela ne tombe pas juste, mais ce n’est pas l’objet du débat ici)
Il est complexe de mélanger des cycles astronomiques divers. Par exemple, un jour est un cycle terrestre, alors qu’un mois est un cycle lunaire, et un an est un cycle solaire.

Prenons, ce mois-ci, nous sommes le mois de Tamouz. Il a ASTRONOMIQUEMENT commencé le 16 juin à 14h06 (temps universel) et durera 29 jours. Autrement dit, suivant la position de la personne sur terre on peut en certains endroits être le 17. De plus le 16 juin on était le 29 Sivan, et dans la réalité, le mois de Tamouz n’a commencé que le 18 juin, en réalité le 17 juin au coucher du soleil.
Même s’il y avait des discordances entre sadducéens et pharisiens, le vote se faisait à la majorité, il n’y avait aucune difficulté, la date était claire mais des discordances pouvaient exister en débat interne.

Pour parler simplement, nous allons comparer avec cette année.
  • 13 Nissan 5775 = s’étend du 1er avril 2015 (coucher du soleil) au 2 avril 2015 (coucher du soleil)
  • 14 Nissan 5775 = s’étend du 2 avril 2015 (coucher du soleil) au 3 avril 2015 (coucher du soleil)
  • 15 Nissan 5775 = s’étend du 3 avril 2015 (coucher du soleil) au 4 avril 2015 (coucher du soleil)
À la fête de Pâque se superposent plusieurs fêtes ou rites.
  • Les hametz: nettoyage de la maison en vue d’en supprimer les ferments de manière à éviter qu’ils ne contaminent le pain azyme (azyme = sans ferment). Cette pratique se déroule le 13 Nissan et doit être finie le 14 Nissan avant midi, dans le 3 avril 2015 avant midi
  • Le sacrifice pascal: ne se fait plus aujourd’hui (sauf par les qaraïtes), car le sacrifice doit obligatoirement se faire dans le Temple. Le sacrifice se déroule dans l’après-midi du 14 Nissan, donc le 3 avril 2015 dans l’après midi.
  • Le repas pascal: Le repas pascal consiste à manger l’agneau sacrifié, notons que les esséniens ne participant plus au culte du Temple, faisaient un repas pascal avec la pain et le vin. Le repas pascal se fait 15 nissan au soir, c’est-à-dire le 3 avril 2015 après le coucher du soleil. 
  • la fête des azyme qui est en réalité la fête de germination de l’orge. Elle dure sept jours et commence aussi le 15 nissan au soir, c’est-à-dire le 3 avril 2015 après le coucher du soleil. 

Si on suit les synoptiques, Jésus est mort dans l’après-midi du 15 Nissan.
Démonstration:

Matthieu 26, 1–2:
Lorsque Jésus eut achevé tous ces discours, il dit à ses disciples : « Vous savez que la Pâque a lieu dans deux jours, et que le Fils de l’homme sera livré pour être crucifié. » 
Imprécision: Sacrifice pascal (fin du 14 Nissan dans l’après midi) ou repas pascal (début du 15 Nissan, dans la soirée)
Marc 14, 1a:
La fête de Pâque et des pains sans levain devait avoir lieu deux jours après.
fête de Pâque = repas pascal donc 15 Nissan au soir, donc on est le 13 Nissan?
Luc 22, 1:
La fête des pains sans levain, appelée la Pâque, approchait.
Remarque: il s’agit de fêtes différentes: confusion entre le sacrifice pascal, le repas pascal et la fête des azymes.
Matthieu 26, 17: 
Le premier jour des pains sans levain, les disciples s’adressèrent à Jésus, pour lui dire : «Où veux-tu que nous te préparions le repas de la Pâque?»
Marc 14, 12
Le premier jour des pains sans levain [15 Nissan au soir], où l’on immolait la Pâque [14 Nissan l’après midi], les disciples de Jésus lui dirent : « Où veux-tu que nous allions te préparer la Pâque ? » 
Luc 22, 7
Le jour des pains sans levain [15 Nissan au soir], où l’on devait immoler la Pâque [14 Nissan l’après midi], arriva, et Jésus envoya Pierre et Jean, en disant : « Allez nous préparer la Pâque, afin que nous la mangions. » Ils lui dirent : « Où veux-tu que nous la préparions ? » 
Matthieu 26, 19:
Les disciples firent ce que Jésus leur avait ordonné, et ils préparèrent la Pâque.
Normalement à la fin du 14 Nissan (après-midi avant le coucher du soleil)
Matthieu 26, 20
Le soir étant venu, il se mit à table avec les douze.
Début du 15 Nissan, dans la soirée.
Matthieu 26, 21–29: Pas de précisions temporelles, idem Marc et Luc.

VU QUE JÉSUS A CÉLÉBRÉ LE REPAS PASCAL, IL A ÉTÉ ARRÊTÉ LA NUIT DU 15 NISSAN, CONDAMNÉ À MORT LE MATIN DU 15 NISSAN, ET A ÉTÉ CRUCIFIÉ LE 15 NISSAN, IL EST MORT LE 15 NISSAN ET A ÉTÉ ENTERRÉ AVANT LE 16 NISSAN.

Si on suit l’Évangile de Jean, Jésus est mort dans l’après-midi, à la fin du 14 Nissan.

Jean 13, 1:
Avant la fête de Pâque [au plus tôt le 13 Nissan], Jésus, sachant que son heure était venue de passer de ce monde au Père
Jean 13, 3–5:
Jésus, qui savait que le Père avait remis toutes choses entre ses mains, qu’il était venu de Dieu, et qu’il s’en allait à Dieu, 4. se leva de table, ôta ses vêtements, et prit un linge, dont il se ceignit. 5. Ensuite il versa de l’eau dans un bassin, et il se mit à laver les pieds des disciples, et à les essuyer avec le linge dont il était ceint.
Claire allusion au nettoyage de la maison en vue d’en enlever les azymes, donc comme on est le soir, on est au début du 14 Nissan.
Jean 18, 28:
Ils conduisirent Jésus de chez Caïphe au prétoire : c’était le matin. Ils n’entrèrent point eux-mêmes dans le prétoire, afin de ne pas se souiller, et de pouvoir manger la Pâque.
Puisque l’agneau pascal n’est pas encore mangé, on est le 14 Nissan au matin. Notons que l’agneau n’est pas encore sacrifié.
Jean 19, 13–14:
Pilate, ayant entendu ces paroles, amena Jésus dehors ; et il s’assit sur le tribunal, au lieu appelé « le Pavé », et en hébreu Gabbatha. 14. C’était la préparation de la Pâque [donc le 14 Nissan], et environ la sixième heure. Pilate dit aux Juifs : « Voici votre roi. »

CONCLUSION
  • Pour les synoptiques Jésus est mort dans l’après-midi du 15 Nissan, pour Jean il est mort le 14 Nissan…
  • Les rédacteurs de ces parties sont non-juifs et n’ont que des connaissances très confuses du déroulement de la fête de Pâque et des fêtes annexes.



mercredi 1 juillet 2015

La chair et le sang de Jésus ou la Lumière et la Vie issues du Logos: aux origines de l'eucharistie.

L'Évangile de Jean ne mentionne pas le repas pascal des synoptique pour des raisons assez évidentes, puisque pour les synoptiques Jésus aurait été exécuté le lendemain du sacrifice pascal, alors que d'après Jean, il l'aurait été concomitamment au sacrifice pascal. Néanmoins en Jean 6, 25–54, nous lisons une longue discussion sur Jésus et sur le pain de vie. Nous pensons que les passages scabreux, parlant de manger la chair de Jésus et de boire son sang, sont des réécritures postérieures qui visèrent à affirmer que le Logos aurait eu une existence humaine, savoir Jésus.
Dans le prologue de Jean nous lisons:
En lui était la vie, et la vie était la lumière des hommes.
Les textes issus de l'hermétisme juif qui fleurissait à Alexandrie au Ier–IIe siècle, nous éclairent davantage. En effet, nous pouvons lire dans le Poemandrès:
Or le Dieu Noûs étant mâle et femelle, puisqu’il existe comme vie & lumière, enfanta d’un logos un second noûs démiurgique qui, comme dieu du feu et du pneuma, façonna sept Gouverneurs enserrant de cercles le monde sensible — et leur gouvernement s’appelle la Fatalité.
Et:
Mais le noûs, Père de toutes choses, comme Il était vie & lumière, enfanta un homme son semblable, qu’Il se prit à aimer comme son propre enfant : c’est qu’il était très beau, puisqu’il était l’image de son père. Ainsi, c’est en réalité de sa propre forme que Dieu devint amoureux, et il lui remit toutes les œuvres qu’il avait façonnées.
Et:
Ainsi, comme je le disais, la naissance de ces Sept se produisit de la façon suivante : il y avait <une terre> femelle et une eau fécondante, et ce qui faisait mûrir était issu du feu. (Chacun) reçut alors son pneuma de l’éther et Nature produisit leurs corps selon la forme (eidos) d’homme. Alors, l'homme qui était vie & lumière, devint âme & intellect (Noûs) : âme à partir de la vie, Intellect (Noûs) à partir de la lumière, et toutes les choses du monde sensible demeurèrent ainsi jusqu’à la fin d’une révolution cosmique <et> au commencement des espèces.
Le corps ou le chair de Jésus, ainsi que son sang, correspondent respectivement à la Lumière et à la vie issues du Logos
Nous estimons donc que la composition des versets 6, 25–54 a été réécrite de manière profane, quand au véritable sens le voici:
25. [Et l’ayant trouvé au-delà de la mer, ils lui dirent : « Rabbi [Maître ou Seigneur], quand es-tu venu ici ? »] 26. le Logos [Jésus] leur dit : « En vérité, en vérité, je vous le dis, vous me cherchez, non parce que vous avez vu des miracles, mais parce que vous avez mangé des pains et que vous avez été rassasiés. 27. Travaillez, non pour la nourriture qui périt, mais pour celle qui subsiste pour la vie éternelle, et que le Fils de l’homme vous donnera ; car c’est lui que le Père, que Dieu a marqué de son sceau. » 28. Ils lui dirent : « Que devons-nous faire, pour faire les œuvres de Dieu ? » 29. Le Logos [Jésus] leur répondit : « L’œuvre de Dieu, c’est que vous croyiez en celui qu’il a envoyé. » 30. « Quel miracle fais-tu donc », lui dirent-ils, « afin que nous le voyions, et que nous croyions en toi ? Que fais-tu ? 31. Nos pères ont mangé la manne dans le désert, selon ce qui est écrit : Il leur donna le pain du ciel à manger. » 32. Le Logos [Jésus] leur dit : « En vérité, en vérité, je vous le dis, Moïse ne vous a pas donné le pain du ciel, mais mon Père vous donne le vrai pain du ciel ; 33. car le pain de Dieu, c’est celui qui descend du ciel et qui donne la vie au monde. » 34. Ils lui dirent : « Seigneur, donne-nous toujours ce pain. » 35. Le Logos [Jésus] leur dit : « Je suis le pain de vie. Celui qui vient à moi n’aura jamais faim, et celui qui croit en moi n’aura jamais soif. 36. Mais, je vous l’ai dit, vous m’avez vu, et vous ne croyez point. 37. Tous ceux que le Père me donne viendront à moi, et je ne mettrai pas dehors celui qui vient à moi ; 38. car je suis descendu du ciel pour faire, non ma volonté, mais la volonté de celui qui m’a envoyé. 39. Or, la volonté de celui qui m’a envoyé, c’est que je ne perde rien de tout ce qu’il m’a donné, mais que je le ressuscite au dernier jour. [Cela signifie que tout dans l’homme doit concourir au processus de la régénération.] 40. La volonté de mon Père, c’est que quiconque voit le Fils et croit en lui ait la vie éternelle ; et je le ressusciterai au dernier jour. » 41. [Les Juifs murmuraient à son sujet, parce qu’il avait dit : « Je suis le pain qui est descendu du ciel. » 42. Et ils disaient : « N’est-ce pas là Jésus, le fils de Joseph, celui dont nous connaissons le père et la mère ? Comment donc dit-il : “Je suis descendu du ciel ?” » Les Juifs et d’ailleurs les chrétiens prennent l’allégorie pour la réalité. 43. Jésus leur répondit : « Ne murmurez pas entre vous.] 44. Nul ne peut venir à moi, si le Père qui m’a envoyé ne l’attire ; et je le ressusciterai au dernier jour. 45. Il est écrit dans les prophètes : Ils seront tous enseignés de Dieu. Ainsi quiconque a entendu le Père et a reçu son enseignement vient à moi. 46. C’est que nul n’a vu le Père, sinon celui qui vient de Dieu ; celui-là a vu le Père. 47. En vérité, en vérité, je vous le dis, celui qui croit en moi a la vie éternelle. 48. Je suis le pain de vie. 49. Vos pères ont mangé la manne dans le désert, et ils sont morts. 50. C’est ici le pain qui descend du ciel, afin que celui qui en mange ne meure point. 51. Je suis le pain vivant qui est descendu du ciel. Si quelqu’un mange de ce pain, il vivra éternellement ; et le pain que je donnerai, c’est ma lumière [chair], que je donnerai pour la vie du monde. » 52. Là-dessus, les profanes [Juifs] disputaient entre eux, disant : « Comment peut-il nous donner sa lumière [chair] à manger ? » 53. Le Logos [Jésus] leur dit : « En vérité, en vérité, je vous le dis, si vous ne mangez la lumière [chair] du Fils de l’homme, et si vous ne buvez sa vie [son sang], vous n’avez point la vie en vous-mêmes. 54. Celui qui mange ma lumière [chair] et qui boit ma vie [mon sang] a la vie éternelle ; et je le ressusciterai au dernier jour. 55. Car ma lumière [chair] est vraiment une nourriture, et ma vie [mon sang] est vraiment un breuvage. 56. Celui qui mange ma lumière [chair] et qui boit ma vie [mon sang] demeure en moi, et je demeure en lui. 57. Comme le Père qui est vivant m’a envoyé, et que je vis par le Père, ainsi celui qui me mange vivra par moi. 58. C’est ici le pain qui est descendu du ciel. Il n’en est pas comme de vos pères qui ont mangé la manne et qui sont morts : celui qui mange ce pain vivra éternellement. » 59. Le Logos [Jésus] dit ces choses dans la synagogue, enseignant à Capernaüm. 60. Plusieurs de ses disciples, après l’avoir entendu, dirent : « Cette parole est dure ; qui peut l’écouter ? » 61. Le Logos [Jésus], sachant en lui-même que ses disciples murmuraient à ce sujet, leur dit : « Cela vous scandalise-t-il ? 62. Et si vous voyez le Fils de l’homme monter où il était auparavant ? 63. C’est l’esprit qui vivifie ; la chair ne sert de rien. Les paroles que je vous ai dites sont esprit et vie. 64. Mais il en est parmi vous quelques-uns qui ne croient point. » [Car Jésus savait dès le commencement qui étaient ceux qui ne croyaient point, et qui était celui qui le livrerait.]
Certains continueront à prétendre que l'hermétisme n'a pas influencé le christianisme, et préférerons les réécritures à l'original... 
Pourtant, soyons sensés, est-ce que réellement, le discours que Jean a attribué à Jésus, pourrait-il avoir été dit? On sait que le judaïsme a horreur du sang, on sait que le judaïsme est répugné par les pratiques cannibales, on sait que le judaïsme refuse d'idolâtrer un homme... Alors la réponse n'est-elle pas évidente, n'est-il pas temps que toi, ami chrétien, tu acceptes le véritable sens caché de l'évangile, et que tu cesses de prendre une allégorie pour la réalité, que tu cesses de courir après l'ombre... que tu cesses de croire qu'un homme déifié va te sauver... trouve plutôt le Logos en toi... celui qui te sauvera, est le Christ en toi, le Christ intérieur, le christ extérieur est un symbole qui te montre à quoi ressemble la vérité, pas la vérité.

On peut néanmoins se demander pourquoi le pain et le vin? Ce n'est évidemment pas quand ils sont cuits ou fermentés qu'ils sont importants, mais quand ils ne sont encore de la farine et du raisin... C'est alors qu'ils s'imprègnent aisément de la Lumière et de la Vie qui émergent de notre Logos intérieur. 
Chez les esséniens, c'est le prêtre le plus saint qui préparait la pâte à pain, croit-on que c'est un hasard: on ne confiait pas cette tâche à un boulanger, à un apprenti, mais bien à l'homme réputé pour sa sainteté... car il était censé savoir faire descendre la bénédiction de Dieu sur terre, sur les hommes et dans les éléments naturels. Ensuite, le pain est cuit et les raisins mis en fermentation, mais ils conservent les influx spirituels dont ils furent imprégnés et ils permettent aux disciples de progresser plus rapidement, afin qu'eux-mêmes soient capables de préparer un pain vivifiant, si pas pour les autres au moins pour eux. Le pain est alors cassé par le prêtre afin de libérer les effluves spirituelles qui furent enfuies dans la pâte. 

Tout ceci est évidemment traité allusivement dans de nombreuses paraboles des évangiles.
Comme par exemple la parabole du semeur (Matthieu 13, 1–9 ; Marc 4, 1–9 ; Luc 8, 1–8. Nous suivons la version de Marc):
Un semeur sortit pour semer. Comme il semait, une partie de la semence tomba le long du chemin : les oiseaux vinrent, et la mangèrent. Une autre partie tomba dans un endroit pierreux, où elle n’avait pas beaucoup de terre ; elle leva aussitôt, parce qu’elle ne trouva pas un sol profond ; mais, quand le soleil parut, elle fut brûlée et sécha, faute de racines. Une autre partie tomba parmi les épines : les épines montèrent, et l’étouffèrent, et elle ne donna point de fruit. Une autre partie tomba dans la bonne terre : elle donna du fruit qui montait et croissait, et elle rapporta trente, soixante, et cent pour un.
La bénédiction de Dieu descend sans cesses sur les mondes, mais personne ne s'en soucie...

Ou (D’après Marc 4, 30–32; Matthieu 13, 31–32; Luc 13, 18–19.)
Le royaume de Dieu est semblable à un grain de sénevé, qui, lorsqu’on le sème en terre, est la plus petite de toutes les semences qui sont sur la terre ; mais, lorsqu’il a été semé, il monte, devient plus grand que tous les légumes, et pousse de grandes branches, en sorte que les oiseaux du ciel peuvent habiter sous son ombre.
La nature spirituelle du Logos est comme insignifiante en nous, pourtant si elle est développée elle donnera du fruit de grande valeur.

Ou (Matthieu 13, 33 et Luc 13, 20–21):
Le royaume des cieux est semblable à du levain qu’une femme a pris et mis dans trois mesures de farine, jusqu’à ce que la pâte soit toute levée.
etc.