samedi 25 juillet 2015

La conversion au Judaïsme d'Izatès, roi d'Adiabène

Dans un passage émouvant des Antiquités Juives, Flavius Josèphe raconte la conversion au Judaïsme d'Izatès, roi d'Adiabène (Livre XX, Chapitre II, §§ 3–4):
Au temps où Izatès vivait au Camp de Spasinès, un commerçant juif, nommé Ananias, qui avait accès dans le gynécée royal, apprit aux femmes à adorer Dieu selon la coutume nationale des Juifs. Grâce à elles il se fit connaître d'Izatès et le persuada aussi. Lorsque celui-ci fut rappelé par son père en Adiabène, Ananias l'accompagna, obéissant à ses pressantes sollicitations. Or, il était arrivé qu'Hélène, instruite de la même façon par un autre Juif, s'était convertie également à leurs lois. Quand Izatès eut pris la royauté et qu'arrivant en Adiabène il vit ses frères et ses autres parents enchaînés, il fut mécontent de ce qui était arrivé. Regardant comme impie de les tuer ou de les garder enchaînés, mais jugeant dangereux de les laisser libres auprès de lui alors qu'ils se souviendraient des offenses reçues, il envoya les uns comme otages à Rome près de l'empereur Claude avec leurs enfants et il expédia les autres sous un prétexte analogue chez Atabane le Parthe.
Ayant appris que sa mère était fort satisfaite des coutumes juives, il s'empressa de s'y rallier également, et croyant qu'il ne serait définitivement juif qu'une fois circoncis, il était prêt à se faire circoncire. Mais sa mère, l'apprenant, tenta de l'empêcher en lui disant que cela le mettrait en danger: en effet, il était roi et il s'aliénerait beaucoup ses sujets s'ils apprenaient qu'il désirait adopter des mœurs étrangères et opposées aux leurs, car ils ne supporteraient pas d'avoir un roi juif. Voilà ce qu'elle disait, s'opposant de toutes ses forces à son dessein, et Izatès rapporta ses paroles à Ananias. Mais ce dernier approuva la mère du roi; il le menaça de le quitter s'il ne lui obéissait pas et de l'abandonner. En effet, il craignait, disait-il, si l'affaire était connue de tous, de risquer de se voir châtié comme responsable de tout cela et comme ayant incité le roi à des actes indignes de lui; d'ailleurs, le roi pouvait adorer Dieu, même sans être circoncis, s'il avait décidé d'observer complètement les lois ancestrales des Juifs, ce qui importait plus que la circoncision. Il lui dit aussi que Dieu lui-même lui pardonnerait d'avoir renoncé à ce vite, contraint à cela par la nécessité et la crainte qu'il avait de ses sujets. Le roi se laissa alors persuader par ses paroles. Mais ensuite, comme il n'avait pas renoncé absolument à son dessein, un second Juif venu de Galilée et nommé Eléazar, qui passait pour très versé dans la loi de ses pères, l'exhorta à accomplir cet acte. En effet, étant entré chez lui pour le saluer et l'avant surpris en train de lire la loi de Moïse: «Tu ignores, dit-il, que tu fais la plus grande offense aux lois et par suite à Dieu: il ne suffit pas de les lire, il faut avant tant faire ce qu'elles ordonnent. Jusques à quand resteras-tu incirconcis ? Si tu n'as pas encore lu la loi sur la circoncision, lis la sur le champ pour savoir quelle est ton impiété.»
Après avoir entendu ces paroles, le roi ne différa plus l'opération: se retirant dans une autre chambre et ayant mandé un médecin, il exécuta ce qu'on lui avait prescrit; puis il envoya chercher sa mère et son maître Ananias et leur indiqua qu'il avait accompli ce rite. Ils furent aussitôt saisis de stupeur et d'une grande crainte, se disant que, si la chose était connue, le roi risquerait de se voir chasser du pouvoir, parce que ses sujets ne supporteraient pas d'être gouvernés par un zélateur des coutumes étrangères, et qu'eux-mêmes seraient en danger, parce que la responsabilité en serait rejetée sur eux. Mais Dieu empêcha leurs craintes de se réaliser. Car, bien qu'Izatès tombât dans mille dangers, il le sauva ainsi que ses fils, en le faisant passer d'une situation désespérée à la sécurité, montrant ainsi que ceux qui lèvent les yeux vers lui et se fient à lui seul ne sont pas frustrés du fruit de leur piété. Mais nous raconterons cela plus loin.
Flavius Josèphe ne donne pas le nom du père d'Éléazar, ce qui est bien dommage. Il n'existe que deux possibilités, soit il ne le connaît pas, soit il le connaît mais ne peut ou ne veut le dire. La première solution étant peu vraisemblable, on est forcé de supposer qu'il ne peut ou ne veut le dire; il convient donc de chercher dans ses œuvres un Éléazar qui pourrait correspondre à cette définition. Or, il y a bien un Éléazar qui correspond à cela, il s'agit d'Éléazar ben Yaïr, qui fut le petit-fils de Judas le Galiléen et le chef sicaire qui commanda la forteresse de Massada qui résista aux légions romaines jusqu'en 74. Les sicaires qui l'accompagnaient, comme lui-même, préférèrent le suicide à la reddition. 
Nous pensons que l'Éléazar qui convainquit Izatès roi d'Adiabène de se faire circoncire, est bien Éléazar ben Yaïr, ce qu'il ne pouvait pas mentionner pour son lectorat romain.

Buste de Flavius Josèphe

Le royaume d'Adiabène


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